Le toit en cana est une vraie gourmandise. C’est joli, exotique, il protège de la chaleur et dessous, il fait toujours bon vivre même en cas de température extrême… Contrairement à la légende, même s’il abrite des petites bêtes, elles s’aventurent très peu à l’intérieur, préférant batifoler dans leur nid douillet. 20 ans que je cohabite avec mon superbe toit. Bon, il est vaste, gigantesque, disproportionné. Il culmine à 8m50 de hauteur, vous imaginez la pente. Constitué de 2 pans à l’avant et 3 à l’arrière, il frôle les 500 m2. De quoi donner le tournis. Ca en fait des caballos de cana. Ben oui, le caballo est la mesure de la cana. J’ai oublié de combien de feuilles il s’agit… peu importe, il y en a beaucoup sur le toit du château de feuilles.
La dernière réfection entière de ce joli chapeau remonte à mars 2016. Puis, il y a eu quelques petites rustines par ci par là. Les ennemis de la cana demeurent les termites, sales bêtes qui grignotent tout, la charpente, les feuilles, la membrane de caoutchouc qui recouvre le bois à l’intérieur. La pluie. La jolie cana préfère le soleil, c’est son chouchou. Mais elle craint aussi les rameaux des arbres, les palmes qui la recouvrent parfois et j’avoue qu’au château de feuilles, des arbres et des palmes, il y en a partout, dessous, dessus et j’éprouve toujours le plus grand mal à les tailler.
Après les pluies diluviennes de la semaine passée et après m’être voilée la face et caché les gouttes d’eau sous des serviettes, je me suis rendue à l’évidence, le moment fatidique était arrivé, il fallait changer la cana. Poussée par je ne sais quelle folie, je me suis renseignée méticuleusement, prête à trahir mon toit de feuilles pour du synthétique. Sauf que non, il m’en coûtait quelques dizaines de milliers de dollars. Ce ne sera pas pour aujourd’hui. Penaude, je me suis excusée auprès de ma cana et j’ai contacté ce cher Riccardo pour commencer les travaux au plus tôt. Comment vous dire, plus de 20 ans que je travaille avec Ricardo. C’est une catastrophe au niveau organisation. Il n’est jamais sur le chantier et ses ouvriers, livrés à eux-mêmes passent plus de temps sur leur mobile que sur les clous et le marteau. Et puis il parle fort, ce qui effraie les chiens donc, il a peur des chiens…Du coup, j’ai employé un superviseur pour faire son boulot et canaliser un peu tous ses gens. Bon je dois reconnaitre que malgré ses défauts, Ricardo est un vrai pro. Il aime et est fier de son job.
Autre souci, mes 4 chiens, pas franchement obéissants et tellement habitués à baguenauder en toute liberté sur leur vaste terrain de jeux. Du coup, j’ai fait réalisé une jolie palissade en bambous tout autours du bungalow et l’on si confine eux et moi durant la journée de travail. Quel plaisir le soir à 5h pile d’ouvrir la barrière et de retrouver nos pénates.
Voilà, nous en sommes au jour 6. Pour éviter de tourner complètement folle, je ne les ai fait travailler que lundi, mardi, mercredi et jeudi. Repos de vendredi à lundi et hier rebelote. Avec un peu de chance et si le temps reste conciliant, tout devrait être terminé jeudi soir…. Enfin terminé après c’est une autre histoire. Vu l’état des lieux, il va me falloir longtemps, longtemps pour tout remettre d’aplomb et retrouver un semblant de propreté dans mon Château de feuilles.



